Le stockage des effluents doit s’envisager globalement, en fonction de son système d’élevage et de ses besoins agronomiques. Citerne souple, géomembrane, fosse aérienne ou enterrée, quelle que soit la solution, il faut anticiper et ne pas sous-estimer les besoins de stockage de ses effluents d'élevage.
Faire le bon choix sur son exploitation, c’est d’abord se poser les bonnes questions. Et avant de se demander s’il vaut mieux investir dans une fosse géomembrane que dans une citerne souple, « l’éleveur doit bien réfléchir au produit qu’il veut sortir de son exploitation », met en garde Tanguy Morel, chef de projet innovations bâtiments à l’Institut de l’élevage. Il faut donc commencer par « chercher à voir si c’est possible de modifier ses pratiques », appuie son collège ingénieur d’études Sylvain Foray. C’est toute la gestion fertilisation et coût de l’épandage qu’il faut prendre en compte.
Êtes-vous plutôt lisier ou fumier ?
Alors, fumier ou lisier ? Le stockage des effluents doit être réfléchie dès la conception d’un bâtiment d’élevage. « Il ne faut pas penser uniquement logement des animaux, mais bien réfléchir au produit qui en sortira » insiste Sylvain Foray.
Le plus économique c’est encore de produire le moins d’effluents possible, donc de mettre au maximum les animaux au pâturage si la situation le permet. « Une vache laitière à 7 000 kilos de lait, c’est soixante litres de déjection par jour, rappelle Sylvain Foray. Si elle est au pâturage, c’est moins d’effluents à gérer ». Les systèmes plus herbagers produisent généralement peu de paille, et optent pour un système lisier par ailleurs plus facile à valoriser par les prairies. Si le système est plus orienté maïs – cultures annuelles, il est préférable d’avoir du fumier. Mais le fumier, c’est aussi plus de mécanisation, plus de temps de travail pour l’épandage.
En tout cas, lisier ou fumier, il faut choisir ! Si c’est entre les deux, c’est « un produit très difficilement gérable », prévient Sylvain Foray. Il faut donc « chasser le fumier mou ! ». Ce type de fumier, issu des aires d’exercices des stabulations à logettes, ne peut en effet se stocker facilement. Plus il est pailleux, plus il pourra être stocké haut et s’épandre facilement.
« Chassons le fumier mou ! »
Le système de litière accumulée présente l’avantage de générer un fumier pailleux, qui peut être stocké au champ au bout de deux mois. De quoi réduire les coûts de stockage. « Si vous disposez d’une partie de votre bâtiment en aire paillée et une aire d’exercice, passer l’intégralité du bâtiment en litière accumulée peut permettre de stocker votre fumier au champ au bout de deux mois », propose Sylvain Foray.
C’est la solution la moins onéreuse… à condition que le fumier soit « non susceptible d’écoulements ». « En bovins viande, on peut voir pas mal d’élevages qui font du stockage au champ et qui ne disposent pas de fumière », constate Jean-Pierre Delmas, technicien bâtiment à la chambre d’agriculture du Tarn. En élevages laitiers où le fumier est curé fréquemment, il est en revanche difficile de se passer de fumière, compte tenu du délai légal de deux mois avant stockage au champ.
L’inconvénient du système litière accumulée, c’est qu’il est très gourmand en paille. Si le prix de la paille est très élevé, comme en Auvergne, il est évidemment préférable d’opter pour un système lisier.
De l’égouttage à la fumière
Les élevages qui produisent un fumier mou peuvent passer par un système d’égouttage. Une grille ou un caillebottis, sur le couloir bétonné, permet l’écoulement des jus vers un canal ou une fosse, la partie la plus sèche, égouttée, est poussée vers une fumière. Un dispositif « très fortement conseillé en système logettes où il est plus difficile d’avoir un fumier qui se tienne », insiste Tanguy Morel. Ce système d’égouttage doit impérativement être anticipé dès la construction du bâtiment d’élevage.
Le fumier se stocke sur fumière, avec une pente de 1 à 2% avant pour évacuer les jus vers un caniveau. Une couverture permet de limiter les eaux de pluie, donc conserver la capacité de stockage. Si la fumière n’est pas couverte, elle doit être associée à une fosse.
Fosses à lisier pour recueillir les effluents d’élevage
Le lisier peut être stocké en fosse caillebotis, sous le bâtiment. Pas d’eau de pluie, pas de pollution visuelle. Mais il y a du dégagement d’ammoniac. Et puis ces fosses ne peuvent pas être facilement agrandies.
La fosse extérieure est une meilleure solution pour le bien-être des animaux, pour l’ambiance bâtiment. Mais cela collecte les eaux de pluie. Si la fosse n’est pas enterrée, l’intégration paysagère est plus difficile. Par ailleurs, il faut une pré-fosse de stockage des lisiers qui arrivent en bout de raclage et une pompe hacheuse pour remonter le lisier dans la fosse aérienne. Cette solution, moins onéreuse au départ en raison du terrassement moindre, se révèle au final moins avantageuse en raison du surcoût de gestion du lisier. Le coût d’entretien est également plus élevé pour les fosses aériennes. « C’est la panne qui est redoutée, surtout ! » constate Jean-Pierre Delmas. Entre fosse aérienne ou enterrée, le choix peut se raisonner aussi selon la topographie. « Quand il y a du dénivelé, on évite les fosses aériennes », résume Jean-Pierre Delmas.
Géomembrane, et citerne souple, moins cher à l’installation
En fosse enterrée, il est possible d’opter aussi pour une fosse géomembrane, ce qui permet de réduire les coûts de terrassement : une bâche EPDM, étanche, remplace le béton. Autre intérêt, la fosse peut plus facilement être agrandie si les besoins évoluent. Il suffit de soulever la bâche, défaire les talus, agrandir la fosse et remettre une bâche. Mais la durée de vie est évidemment très inférieure, environ dix ans. Par ailleurs, on n’est jamais à l’abri d’une déchirure de la bâche en brassant le lisier. Contrairement aux fosses en béton, la fosse géomembrane requiert une surface au sol plus importante, car elle est moins profonde et les parois sont évasées, avec des pentes proches de 45°. A capacité équivalente, elle reçoit davantage d’eaux de pluie.
La citerne souple, elle, présente l’avantage d’être hermétique, donc de ne pas récolter d’eaux de pluie. Mais attention aux hivers rudes, le liquide stocké peut geler et détruire la poche. Cette citerne, dont la dimension peut varier entre 30m3 à 400m3 est posée sur terrain plat, pas besoin de permis de construire. Mais elle ne peut pas stocker n’importe quel effluent. Le liquide arrive en général par gravité. Ce sont essentiellement des effluents peu chargés, eaux vertes, eaux blanches ou jus issus de séparation de phase. Il est peu adapté au lisier, à moins qu’il ne s’agisse d’un lisier très liquide. Dans ce cas, ce sont plus généralement les élevages laitiers qui optent pour cet équipement, leurs lisiers étant souvent plus liquides.
Le séparateur de phase, quant à lui, est intéressant dans certains cas, pour les systèmes lisier. A partir du lisier, il produit d’un côté un effluent liquide et de l’autre un effluent solide qui pourra être épandu ou exporté. C’est une solution pour les exploitations dont les surfaces sont dans les périmètres de captage où la réglementation interdit d’épandre du lisier. Un système qui demeure assez onéreux.
Stocker plus longtemps pour une meilleure valorisation des effluents
Le stockage des effluents d'élevage, ce n’est pas seulement respecter la réglementation. « Il ne faut pas chercher à stocker uniquement pour répondre aux exigences réglementaires, suggère Tanguy Morel. On peut aller parfois jusqu’à six ou sept mois plutôt que se limiter aux quatre mois et demi réglementaires si cela permet de l’épandre au meilleur moment, quand la végétation en a besoin, et ainsi valoriser au mieux ces effluents. Selon le temps de présence des animaux en bâtiment, des pratiques agronomiques, de l’assolement, des pratiques, la durée de stockage peut être plus importante que le minimum réglementaire. Par ailleurs, les pratiques peuvent évoluer : augmentation du cheptel ou évolution de la surface en pâturage. Il faut anticiper ces éléments, insiste Sylvain Foray. « Il ne s’agit pas de faire du béton à tout prix, mais considérer que les changements de pratiques peuvent avoir une incidence non négligeable sur ses capacités de stockage ».
Raisonner les besoins de stockage des effluents d'élevage
Attention à ne pas minimiser la capacité de stockage des équipements. « Il est préférable de pouvoir stocker pendant six mois ses déjections si cela répond aux pratiques de l’éleveur en termes d’épandage plutôt qu’appeler l’administration en plein mois de janvier parce que la fosse est en train de déborder », insiste l’ingénieur de l’Institut de l’élevage. « Même pour les élevages qui ne sont pas en installations classées, il faut prévoir un stockage qui couvre bien toute la période hivernale », abonde Jean-Pierre Delmas, de la chambre d’agriculture du Tarn.
Et puis les installations de stockage sont peu évolutives. Or, « il est rare qu’au cours de sa carrière on ne fasse pas évoluer son bâtiment », glisse Jean-Pierre Delmas. Alors autant anticiper la capacité de stockage.
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Stockage des effluents d’élevage : ce qu’il faut retenir
· Le dimensionnement des équipements ne doit pas être minimisé : il faut être en mesure d’allonger la durée de stockage des effluents si les besoins agronomiques l’exigent.
· Mieux gérer ses effluents peut passer par un développement du pâturage qui permet de limiter les besoins de stockage
· Avoir un fumier très pailleux permet de le stocker plus facilement, plus haut
· La fosse à lisier caillebotis, sous le bâtiment, présente l’avantage de ne pas collecter les eaux de pluies.
· La fosse à lisier extérieure, si elle n’est pas enterrée, nécessite une pré-fosse de stockage.
· La fosse géomembrane permet de s’affranchir de travaux coûteux de terrassement, mais sa durée de vie est moindre pour stocker les effluents.
· La citerne souple est la solution la plus économique et plus évolutive, mais elle est plus fragile.
Les informations généralistes contenues dans cet article ne sauraient remplacer un diagnostic personnalisé des parcelles.