Les semis de printemps approchent, il est temps de penser aux destructions des couverts végétaux implantés entre deux cultures. Pour choisir la date et le mode, plusieurs paramètres entrent en jeu. Voici quelques clés de raisonnement.
Sauf si le semis de la culture principale est réalisé sous couvert, celui-ci est supprimé afin de préparer le lit de semences. Pour choisir la date de destruction, il s’agit de viser un juste équilibre entre laisser le couvert assurer pleinement ses fonctions et limiter un éventuel effet dépressif sur la culture suivante. Un compromis pas toujours évident à trouver.
Ne détruire les couverts végétaux ni trop tôt, ni trop tard
Au-delà des obligations réglementaires, le couvert végétal répond à plusieurs objectifs, selon les espèces semées : protection du sol contre l’érosion, amélioration de la structure du sol, concurrence vis-à-vis des adventices, stockage du carbone, rétention de l’eau, piégeage de l’azote…
Mieux vaut donc permettre au couvert végétal de bien se développer et produire de la biomasse au maximum, pour remplir ses différents rôles et optimiser les restitutions pour la culture suivante. Par ailleurs, des plantes au stade floraison ou à épi pointant sont plus facilement destructibles.
En parallèle, il est recommandé de ne pas intervenir trop tardivement non plus, au risque de pénaliser la culture suivante : problèmes de levées en raison d’un assèchement du sol, moindre disponibilité de de l’azote suite à la lignification du couvert (rapport C/N > 20) et concurrence des repousses si le couvert est monté à graines.
Tenir compte des espèces de couvert semées et de la culture principale à suivre
La date de destruction va donc dépendre des espèces de couverts semées mais également de la culture suivante et du type de sol (encadré 1).
Tableau 1 : Date conseillée de destruction des couverts, en fonction du sol et de la culture suivante – source : ARVALIS-Institut du végétal

Par exemple, avant maïs, la destruction de tous les couverts doit prendre place au maximum le 15 mars, selon les recommandations d’ARVALIS.
La praticabilité de la parcelle peut également être un facteur important dans le positionnement de l’intervention.
Les conditions de ressuyage doivent en effet permettre de préserver la structure du sol.
Les obligations réglementaires avant de détruire les couverts végétaux
Adoptée en 1991, la directive européenne « nitrates » vise la réduction de la pollution azotée des eaux souterraines et superficielles, ainsi que l’eutrophisation engendrée par les activités agricoles, en particulier dans les zones vulnérables. Les Etat-membres sont en charge de transposer cette directive à l’échelle nationale, en s’engageant à une révision tous les quatre ans. L’une des obligations phares : la mise en place d'une quantité minimale de couverture végétale au cours des périodes pluvieuses, afin de limiter le lessivage de l’azote.
En France, chaque région décide des programmes d’actions basés sur les mesures nationales et adaptés à leur contexte. Ces programmes peuvent préciser par exemple la durée minimale de maintien du couvert, les dates d’implantation et de destruction, les dérogations possibles, les situations où la destruction chimique est interdite…
Le 7eme programme d’action national (PAN) est actuellement en cours de finalisation, après consultation publique pendant l’été 2022. A ce jour, plus de 70 % de la Surface agricole Utile est classée en zones vulnérables.
Quel mode de destruction des couverts végétaux choisir ?
Pour détruire les couverts végétaux, les possibilités qui s’offrent aux agriculteurs sont multiples, avec soit du mécanique, soit du chimique, selon les cas. Mais elles dépendent évidemment du contexte de l’exploitation tant sur le volet réglementaire (zones vulnérables ou non, cahiers des charges…), que sur le type d’outils disponibles, mais aussi en termes d’organisation du travail (temps de chantier notamment).
Le choix de la technique doit également prendre en compte son niveau d’efficacité sur le couvert (tableau 2).
Tableau 2 : Sensibilité des espèces de couverts à différents modes de destruction

Détruire ses couverts végétaux : zoom sur les différents modes de destruction
- Le gel : la solution la plus économique pour détruire les couverts
Le gel représente un mode de destruction le plus confortable en termes de temps passé comme de coût. Mais comme c’est un phénomène qui reste incertain, cela nécessite d’avoir réalisé une analyse fine du climat local et d’avoir raisonné au préalable le choix de l’espèce et la date de destruction envisagée.
Dans les secteurs au climat continental (nord-est de la France, montagne…), les facteurs de réussite sont davantage au rendez-vous.
Pour les espèces gélives, deux recommandations sont mises en avant : enregistrer un épisode de gel avant le 31 décembre et avoir un couvert bien développé car plus sensible. Dans le cas contraire, mieux vaut s’orienter vers une intervention mécanique.
- Le roulage des couverts amplifie le rôle du gel
Le roulage doit s’effectuer sur des couverts bien développés, avec un sol bien ressuyé. L’idéal est d’intervenir lors d’un épisode de gel : les blessures engendrées sur les plantes les rendent davantage sensibles. De plus, les résidus végétaux laissés au sol continuent d’assurer la protection du sol. Attention toute fois aux risques de tassement.
- Le broyage : peu efficace sur graminées et crucifères
Le broyage présente plusieurs avantages. Comme dans le cas du roulage, les fines particules restent sur place, créant une couche protectrice pour le sol. Et elles se dégradent rapidement, facilitant le travail du sol qui suit, comme le labour ou le déchaumage, qu’on réalisera dans les deux/trois jours. A éviter sur graminées (risque de repousses) et sur crucifères.
S’orienter vers un déchaumage des couverts végétaux ?
Quel que soit le type de déchaumeur utilisé – à dent, à disques indépendants …-, il s’agit d’un outil polyvalent, qui permet à la fois de détruire le couvert et de travailler le sol en profondeur. Il sert ainsi à préparer l’implantation de la culture suivante. Son efficacité est insuffisante sur graminées, nécessitant de réaliser d’autres passages. Pour la réussite de l’opération, mieux vaut intervenir dans des parcelles bien ressuyées et sur des couverts pas trop développés, avec une vitesse de chantier rapide (supérieure à 10 km/h).
Le cover-crop lourd : à coupler avec un rouleau pour détruire les couverts végétaux
Le cover-crop permet de broyer et d’incorporer le couvert en profondeur, tout en préparant le lit de semences. Inconvénient, le hachage reste grossier. Il est recommandé de le combiner avec un rouleau lourd afin d’affiner et aplanir la surface. Comme avec le déchaumeur, utiliser l’outil sur un sol bien ressuyé, en le réglant sur une vitesse élevée et prévoir de renouveler l’intervention en cas de graminées.
Optimiser l’utilisation de la charrue sur couverts
Si le labour est toujours d’actualité sur l’exploitation, la charrue offre l’avantage d’être efficace sur toutes les espèces. Elle permet à la fois de retourner le sol et de détruire le couvert, avec un enfouissement des végétaux, d’autant plus efficace s’ils sont peu développés ou gelés. Toutefois, certaines espèces sont sujettes à la repousse via leurs organes de réserve, comme le radis ou la navette. Avec des couverts très hauts type moutarde, des risques de bourrage existent. Si le labour est envisagé, s’orienter donc vers des espèces moins hautes au moment des semis d’interculture. Et avant le passage de la charrue, prévoir un broyage ou de coucher le couvert pour faciliter son enfouissement.
Quelles solutions chimiques pour détruire les couverts ?
L’avenir du glyphosate est actuellement incertain. Faisant suite à l’expiration de son autorisation de mise sur le marché, la Commission européenne a signé une prolongation d’un an, en attendant la décision définitive de l’Efsa (Autorité Européenne de Sécurité des Aliments) prévue en juillet 2023.
Selon un rapport de l’ANSES publié le 9 octobre 2020, les conclusions ont fixé des règles d’utilisation, notamment en cas d’impasses techniques, avec des restrictions (doses, situation des parcelles...) selon la filière.
Dans les cas où son usage est encore possible, le glyphosate représente effectivement une solution facile à mettre en place : débits de chantiers importants, efficacité sur de nombreuses espèces de couverts mais aussi des adventices et repousses (notamment graminées), conditions d’interventions assez peu dépendantes de l’hygrométrie de la parcelle, faible dégradation de la structure du sol…
Le glyphosate peut être associé à du 2.4 D, pour renforcer l’action sur dicotylédones. Attention toutefois aux délais d’application à respecter avant le semis de certaines cultures.
A noter que dans certains départements, la directive nitrates peut également limiter le recours aux traitements chimiques pour la destruction des couverts.
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Les informations délivrées dans la fiche offrent une connaissance générale des solutions à envisager. Elles ne peuvent remplacer une observation adaptée des parcelles afin de bien identifier ses caractéristiques propres et la réalité du terrain. Crédit photo Adobe Stock.